Violence, précarité et discrimination aux Etats Généraux de la Femme 2010.
Après sept mois de débats et des rendez-vous dans cinq villes de France (Lille, Lyon, Marseille, Paris et Bondy) où de nombreuses femmes ont pris la parole, le magazine ELLE clôturait le 7 mai dernier les Etats généraux de la femme 2010 lors d'un grand rassemblement à Sciences Po à Paris. Certains pouvaient suivre les débats en direct en vidéo sur ELLE.fr et quelques privilegies et plusieurs centaines de privilegiées étaient conviés pour l'occasion. Faisant partie de ces dernieres, le déplacement ne fut pas vain puisque, il ne s'agissait pas d'une pure opération de com comme a pu l'écrire Mry qui a certes remarqué que les femmes avaient parlé mais ne les a vraisemblablement pas écoutées et qui, en guise de com, a surtout fait la sienne.
La manifestation était remarquablement organisée et articulée autour de 4 tables rondes "Femmes et pouvoir" , "Liberté, maternité, sexualité", "Violence, précarité et discrimination" et "Les stéréotypes ont la vie dure", les restitutions furent riches en enseignement. Il reste que sur le sujet qui me tenait plus particulièrement à coeur, celui des violences faites aux femmes et plus précisément des violences conjugales, il s'en est fallu de peu que je reste sur ma faim.
Il y eut certes beaucoup d'émotion lorsque Kahina Benziane, la soeur aînée de Sohane, brûlée vive en 2002 à Vitry sur Seine, a rendu hommage à sa soeur, beaucoup d'intérêt prêté aux propos tenus par Jeannette Bougrab, présidente de la Halde, venue s'exprimer sur les discriminations et la précarité, qui furent confirmés par Françoise Milewski, chercheuse à l’OFCE, et même un peu de surprise lorsque Naky Sy Savané, comédienne d’origine africaine, a entonné une chanson africaine avant d'évoquer la question de l'excision.
Il est seulement permis de se demander, comme me le faisait justement remarquer une jeune femme, si en cette année 2010 où les violences faites aux femmes sont consacrées Grande Cause Nationale, ce thème n'aurait pas mérité une table ronde à lui tout seul.
Certes, comme le soulignait assez justement Olympe (du plafond de verre), la question de la violence faite aux femmes bénéficie d'une audience dont ne jouissent pas d'autres sujets de société. A cela, j'objecterai pourtant, qu'en la matière, nous sommes surtout habitués à la dure réalité des chiffres et aux trop nombreux faits divers.
En revanche, quel est le quotidien des femmes victimes de violences conjugales, qui sont elles, comment assument-elles leur rôle de mère au milieu de l'enfer conjugal, sont elles encore plus touchées par la précarité et cette même précarité est-elle seulement d'ordre pecuniaire, n'est-elle pas aussi matérielle ou morale ? Quels écueils rencontrent elles au niveau de la Loi, de la Justice, de la Société et quels changements attendent-elles ? Ce sont autant de questions que nous pouvions nous poser mais qui n'étaient au programme d'aucun intervenant puisque même Gisèle Halimi qui préside l'Association "Choisir la cause des Femmes" dont le but est aussi de " dénoncer et lutter contre les violences physiques et morales faites aux femmes " avait décidé de consacrer son intervention à la très intéressante question de la clause de l'Europeenne la plus favorisée.
Les violences conjugales auraient donc pu rester le parent pauvre de la journée de clôture des Etats Généraux de la Femme 2010 alors qu'elles ne pouvaient être passées sous silence lors de cette journée tant les chiffres confirment que les femmes en sont les premières victimes. Nous avons donc frôlé l'ecueil et ce dernier n'a été évité que par la présence très remarquée (la charmante Audrey Pulvar qui animait les débats s'exclamant d'ailleurs "mais vous êtes partout") de participantes membres de l'Association SOS Les Mamans résolument décidées à se faire entendre.
Une première " maman de SOS Les Mamans " aborda la difficulté supplémentaire engendrée par la maternité là où la violence entraîne déjà précarité, exclusion, asservissement et vulnérabilité, une seconde qui dissimulait à peine son émotion témoigna du parcours judiciaire et de la double peine des victimes, avant que la Présidente de l'Association SOS LES MAMANS ne rappelle :
Qu'elles soient remerciées d'avoir mis en lumière la difficulté des mères de plus en plus fragilisées par le système (Elles représentent 54% des personnes prises en charge avec leurs enfants par le secours catholique en 2009) et de plus en plus séparées aussi (1 sur 3 aujourd'hui contre 1 sur 10 dans les années 60)" et d'avoir attiré l'attention sur le fait que, dans un contexte de crise économique, ce sont aussi les plus atteintes par la précarité.
A titre d'exemple, dans une société où la mobilité est de mise, ces femmes s'exposent au risque d'être soupconnées de vouloir éloigner leur(s) enfant(s) du père et de voir ainsi modifier les modalités de la résidence des enfants si elle obéissent a des impératifs professionnels. Il est regrettable que cette question n'ait pas été plus amplement développée par le Magazine Elle et cela d'autant plus qu'une majorité d'hommes se sont emparés des commentaires sous l'article " Violences : mourir dans le silence ce n'est pas possible ". Si chacun dispose de la liberté d'expression, qu'il nous soit permis de nous interroger sur le point de savoir si la modération n'aurait pas été de mise dès lors qu'il est difficilement tolérable de lire sur un tel sujet des commentaires tels que " On n'a pas le droit de dire qu'il y a des hommes qui souffrent ? S'il y en a effectivement peu qui meurent sous les coups de leur femme ou compagne (la nature ayant bien fait les choses), combien sont poussés au suicide ou à l'autodestruction par des mégères pas du tout apprivoisées ? Combien d'hommes à qualités égales obtiennent-ils la garde de leurs enfants ? A revenu égal, quelle est la proportion de femmes et d'hommes condamnés à des prestations compensatoires et à des contributions pharaoniques ? La victimisation à outrance à laquelle nous assistons ne sert pas la cause des femmes ".
Naturellement, ceux qui osent opposer à la douleur des maux et aux blessures aux corps et à l'âme, la souffrance de leur porte-monnaie n'abuseront personne. Gardons, cependant, l'espoir qu'au delà de la prise de paroles de victimes qui n'avaient pas ete pressenties, un Magazine comme Elle apporte un réel éclairage sur la violence dont sont victimes ces femmes victimes et à travers elles leurs enfants en leur donnant un réel espace de paroles. La rubrique était d'ailleurs intitulée "La Parole aux femmes". En l'état, je suis restée sur ma faim.
Après sept mois de débats et des rendez-vous dans cinq villes de France (Lille, Lyon, Marseille, Paris et Bondy) où de nombreuses femmes ont pris la parole, le magazine ELLE clôturait le 7 mai dernier les Etats généraux de la femme 2010 lors d'un grand rassemblement à Sciences Po à Paris. Certains pouvaient suivre les débats en direct en vidéo sur ELLE.fr et quelques privilegies et plusieurs centaines de privilegiées étaient conviés pour l'occasion. Faisant partie de ces dernieres, le déplacement ne fut pas vain puisque, il ne s'agissait pas d'une pure opération de com comme a pu l'écrire Mry qui a certes remarqué que les femmes avaient parlé mais ne les a vraisemblablement pas écoutées et qui, en guise de com, a surtout fait la sienne.
La manifestation était remarquablement organisée et articulée autour de 4 tables rondes "Femmes et pouvoir" , "Liberté, maternité, sexualité", "Violence, précarité et discrimination" et "Les stéréotypes ont la vie dure", les restitutions furent riches en enseignement. Il reste que sur le sujet qui me tenait plus particulièrement à coeur, celui des violences faites aux femmes et plus précisément des violences conjugales, il s'en est fallu de peu que je reste sur ma faim.
Il y eut certes beaucoup d'émotion lorsque Kahina Benziane, la soeur aînée de Sohane, brûlée vive en 2002 à Vitry sur Seine, a rendu hommage à sa soeur, beaucoup d'intérêt prêté aux propos tenus par Jeannette Bougrab, présidente de la Halde, venue s'exprimer sur les discriminations et la précarité, qui furent confirmés par Françoise Milewski, chercheuse à l’OFCE, et même un peu de surprise lorsque Naky Sy Savané, comédienne d’origine africaine, a entonné une chanson africaine avant d'évoquer la question de l'excision.
Il est seulement permis de se demander, comme me le faisait justement remarquer une jeune femme, si en cette année 2010 où les violences faites aux femmes sont consacrées Grande Cause Nationale, ce thème n'aurait pas mérité une table ronde à lui tout seul.
Certes, comme le soulignait assez justement Olympe (du plafond de verre), la question de la violence faite aux femmes bénéficie d'une audience dont ne jouissent pas d'autres sujets de société. A cela, j'objecterai pourtant, qu'en la matière, nous sommes surtout habitués à la dure réalité des chiffres et aux trop nombreux faits divers.
En revanche, quel est le quotidien des femmes victimes de violences conjugales, qui sont elles, comment assument-elles leur rôle de mère au milieu de l'enfer conjugal, sont elles encore plus touchées par la précarité et cette même précarité est-elle seulement d'ordre pecuniaire, n'est-elle pas aussi matérielle ou morale ? Quels écueils rencontrent elles au niveau de la Loi, de la Justice, de la Société et quels changements attendent-elles ? Ce sont autant de questions que nous pouvions nous poser mais qui n'étaient au programme d'aucun intervenant puisque même Gisèle Halimi qui préside l'Association "Choisir la cause des Femmes" dont le but est aussi de " dénoncer et lutter contre les violences physiques et morales faites aux femmes " avait décidé de consacrer son intervention à la très intéressante question de la clause de l'Europeenne la plus favorisée.
Les violences conjugales auraient donc pu rester le parent pauvre de la journée de clôture des Etats Généraux de la Femme 2010 alors qu'elles ne pouvaient être passées sous silence lors de cette journée tant les chiffres confirment que les femmes en sont les premières victimes. Nous avons donc frôlé l'ecueil et ce dernier n'a été évité que par la présence très remarquée (la charmante Audrey Pulvar qui animait les débats s'exclamant d'ailleurs "mais vous êtes partout") de participantes membres de l'Association SOS Les Mamans résolument décidées à se faire entendre.
Une première " maman de SOS Les Mamans " aborda la difficulté supplémentaire engendrée par la maternité là où la violence entraîne déjà précarité, exclusion, asservissement et vulnérabilité, une seconde qui dissimulait à peine son émotion témoigna du parcours judiciaire et de la double peine des victimes, avant que la Présidente de l'Association SOS LES MAMANS ne rappelle :
"qu’une femme, et bien souvent une mère, meure tous les 3 jours en France sous les coups de son conjoint. Selon l’Observatoire national de la délinquance, seulement 10% des femmes déposent plainte si l’auteur est ce conjoint, et 8% s’il s’agit d’un autre membre de la famille. Il faut savoir que la justice familiale ne prend pas en compte les violences conjugales (deux procédures différentes), et ces violences perdurent à l'occasion de l'exercice de l'autorité parentale. En France, 4 millions d'enfants sont témoins de violences conjugales et 235 000 enfants seraient en danger. Les femmes, les mères se retrouvent devant un choix impossible. Soit, elles respectent le droit de visite avec le risque des violences que cela entraîne, soit, elles éloignent leur enfant, mais deviennent alors des délinquantes aux yeux de la loi ! ".
Qu'elles soient remerciées d'avoir mis en lumière la difficulté des mères de plus en plus fragilisées par le système (Elles représentent 54% des personnes prises en charge avec leurs enfants par le secours catholique en 2009) et de plus en plus séparées aussi (1 sur 3 aujourd'hui contre 1 sur 10 dans les années 60)" et d'avoir attiré l'attention sur le fait que, dans un contexte de crise économique, ce sont aussi les plus atteintes par la précarité.
A titre d'exemple, dans une société où la mobilité est de mise, ces femmes s'exposent au risque d'être soupconnées de vouloir éloigner leur(s) enfant(s) du père et de voir ainsi modifier les modalités de la résidence des enfants si elle obéissent a des impératifs professionnels. Il est regrettable que cette question n'ait pas été plus amplement développée par le Magazine Elle et cela d'autant plus qu'une majorité d'hommes se sont emparés des commentaires sous l'article " Violences : mourir dans le silence ce n'est pas possible ". Si chacun dispose de la liberté d'expression, qu'il nous soit permis de nous interroger sur le point de savoir si la modération n'aurait pas été de mise dès lors qu'il est difficilement tolérable de lire sur un tel sujet des commentaires tels que " On n'a pas le droit de dire qu'il y a des hommes qui souffrent ? S'il y en a effectivement peu qui meurent sous les coups de leur femme ou compagne (la nature ayant bien fait les choses), combien sont poussés au suicide ou à l'autodestruction par des mégères pas du tout apprivoisées ? Combien d'hommes à qualités égales obtiennent-ils la garde de leurs enfants ? A revenu égal, quelle est la proportion de femmes et d'hommes condamnés à des prestations compensatoires et à des contributions pharaoniques ? La victimisation à outrance à laquelle nous assistons ne sert pas la cause des femmes ".
Naturellement, ceux qui osent opposer à la douleur des maux et aux blessures aux corps et à l'âme, la souffrance de leur porte-monnaie n'abuseront personne. Gardons, cependant, l'espoir qu'au delà de la prise de paroles de victimes qui n'avaient pas ete pressenties, un Magazine comme Elle apporte un réel éclairage sur la violence dont sont victimes ces femmes victimes et à travers elles leurs enfants en leur donnant un réel espace de paroles. La rubrique était d'ailleurs intitulée "La Parole aux femmes". En l'état, je suis restée sur ma faim.